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Culture

Pourquoi les films français ont-ils tant de mal à traverser l'Atlantique ?

By Jon Davies
21/04/2016

Bien qu'il soit américain, Woody Allen adore le cinéma français. Mais cela ne l'empêche pas de blaguer sur la réputation qu'ont les films français d'être destinés uniquement aux intellos. Dans Annie Hall, il va même jusqu'à inviter Diane Keaton pour un rendez-vous romantique voir Le Chagrin et La Pitié, un documentaire français de 4 heures sur l'Occupation. Quelle fille pourrait résister ?... Mais pour quelles raisons les Américains pensent-ils que les films français sont difficiles et ennuyeux à mourir ?

Commençons par une petite mise au point sur les stéréotypes. Qu'entend-on exactement par "les Américains" ? Les préférences des Américains ne sont évidemment pas tous identiques : les clients des "art houses" new-yorkaises ont certainement plus en commun avec les Européens que leurs cousins de la Bible Belt, et les cinéphiles français sont probablement plus familiers avec Bienvenue chez les Ch'tis qu'avec Claire Denis. Au Royaume-Uni, les amateurs de cinéma apprécient peut-être davantage le cinéma français qu'aux Etats-Unis, mais la différence n'est pas énorme. Nous allons donc devoir généraliser !

Et Dieu créa... la femme
Et Dieu créa... la femme

L'une des premières explications est probablement la barrière de la langue. J'en ai moi-même fait l'expérience : nombre de mes amis - par ailleurs très intelligents - trainent des pieds dès que je leur propose d'aller voir un film sous-titré. Est-ce la peur de "l'inconnu", ou simplement l'agacement de devoir lire en même temps qu'on regarde les images ? Sûrement un peu des deux. Mais alors que se passe-t-il si on enlève les sous-titres ? Si on remonte au cinéma muet d'avant 1914, quand les films français connaissaient aux Etats-Unis un franc succès (et vice-versa), la "frenchness" des films ne semblait pas poser problème, donc le contenu ne constitue visiblement pas un réel obstacle. En effet, les histoires d'amour légèrement audacieuses dont raffolent les réalisateurs français peuvent attirer un public américain - prenez par exemple Et Dieu... créa la femme de Vadim, qui a fait salle comble aux Etats-Unis, malgré le fait que le film ait été censuré dans de nombreux Etats. La contemplation de la belle Brigitte Bardot aura probablement pris le dessus sur la nécessité de lire les dialogues... Dans ce cas, le doublage pourrait-il être la solution ? Les Français vont souvent voir des films doublés et les techniques de doublage se sont largement améliorées, mais c'est une option coûteuse, et le public américain pour les films étrangers ne justifie malheureusement pas de telles dépenses. Ce n'est donc pas par là qu'il faut se tourner !

Une deuxième raison pour une telle frilosité à l'encontre des films français pourrait être la limitation de l'offre aux Etats-Unis. Chaque année, près de 200 films sont produits en France. La plupart sont des films de divertissement, des thrillers et des comédies, et très peu sont montrés à l'international. Les films sélectionnés sont généralement les gagnants du Festival de Cannes, les nominés aux Oscars et ceux réalisés par les grands noms du cinéma : les Audiard, Jaoui et Téchiné, qui constituent souvent des challenges de taille. De temps en temps, un film qui réunit les critères de qualité et de divertissement parvient à percer : ce fût notamment le cas du Fabuleux Destin d'Amélie Poulain et d'Intouchables, qui ont bien marché aux Etats-Unis et ont généré respectivement 33 et 13 millions de dollars. Mais La Haine, extraordinaire mais peut-être trop crû, n'a remporté que 300.000 dollards, ce qui est peu comparé à l'équivalent de 15 millions de dollards qu'il a généré en France. Trop réaliste ? Mal promu ? Le film a pourtant bien marché à Londres. 

Une troisième explication pourrait être la manière catastrophique avec laquelle les distributeurs américains s'occupent des films français. Depuis longtemps aux Etats-Unis, les distributeurs ont pour habitude de couper des scènes qu'ils ne trouvent pas nécessaires, ce qui a pour effet de rendre les films totalement incompréhensibles. Et quand ce n'est pas le scénario qu'ils massacrent, c'est à la traduction qu'ils s'attaquent, même parfois dans les titres. Le fait de renommer A Nous La Liberté en A Mouse La Liberté n'a sûrement pas aidé.

Diabolique
Diabolique

Une quatrième explication pourrait être les "remakes" : pourquoi les studios américains rempliraient-ils les caisses des producteurs français quand les films peuvent être refaits en anglais ? Cette pratique remonte aux années 30, quand Pépé le moko a été transformé en Algiers, Le jour se lève en The Long Night et, plus récemment, un remake du Nikita de Luc Besson intitulé Nom de code : Nina a fait son apparition sur les écrans américains. Le résultat n'était pas mal, mais pourquoi ne pas trouver plutôt une autre histoire ? Cela constitue en effet une barrière entre les Américains et les productions françaises. Et si le remake est aussi mauvais que celui de Diabolique datant de 1996, il y a peu de chance pour que le public américain s'intéresse à la version originale. Même les films les plus susceptibles d'emporter l'adhésion du public passent par le remake hollywoodien : c'est notamment le cas, au moment où j'écris ces lignes, d'Un Prophète de Jacques Audiard...

L'Atlantique est un océan difficile à traverser, et malgré les efforts faits par le gouvernement français, qui a ouvert un bureau Unifrance à New York depuis bien longtemps, les Américains rechignent toujours à opter pour un film français quand ils vont au cinéma - surtout s'ils ne vivent pas dans une grande ville. Par ailleurs, l'offre américaine en DVDs et vidéos à la demande écrase totalement les offres européennes. 

Ne faudrait-il pas parler de réticence américaine envers les films étrangers, plus globalement ? La différence de langue, les sous-titres, une mauvaise distribution et le massacre des films n'affectent pas que la France, et je préfère encore éviter le sujet des films britanniques aux Etats-Unis... Les films français ne sont peut-être aussi ennuyeux ou inspirants que le dernier que vous avez vu !

 

Jon Davies enseigne le cinéma français au Morley College de Londres et donne régulièrement des conférences ouvertes au public (plus d'informations ici).

COMMENTAIRES:

22/04/2016 - arnottdavies a dit :

Thanks for the comments writers_reign (by the way love the pun). Looking at the US elections I wonder whether much has changed since the 30's. Too many flat fields and cattle? Who knows? You may be interested in my next piece where I discuss what makes French cinema so special. I'd be interested to see what you think. Jon Davies

21/04/2016 - writers_reign a dit :

We can find the answer by going back to the late 1930s and the notorious comment that Katherine Hepburn was 'box-office poison'. The comment was made by cinema owners in the mid-West and whilst it reflected the views of the largely rural communities who comprised movie-goers in that region it wasn't an opinion shared by their counterparts in New York, Chicago, San Francisco and other large Metropolitan areas. In other words America is a large country and Katherine Hepburn tended to appear in sophisticated films set primarily in urban areas that had little or no appeal to farmers. Her response was to commission sophisticated dramatist Philip Barry to write a play for her (she had already starred in a screen adaptation of his Broadway hit 'Holiday'). He came up with the ultra-sophisticated 'The Philadelphia Story', she starred in it on Broadway, it was a smash and she sold the rights to MGM and subsequently starred in the film version. No more 'box-office poison' labels. A similar situation obtains with French films in the USA. In my opinion - and speaking as an English person - French cinema is the best in the world, excellent in all major departments, Writing, Directing, Acting. About 90% of French films address the Human Condition or, to put it another way, they are largely about People and th problems of living rather than sequels and cgi. They cover a reasonable wide spectrum; Drama, check, Comedy, check, Thriller, check, and the last category can also be sub-divided into Polars and Policiers. In short an audience educated to crave yet another Superman/Batman/Monster/ will need severe retraining to find anything at all, least of all enjoyment and pure entertainment in the latest Anne Fontaine, Danielle Thompson, Toni Marshall, Nicole Garcia, Marion Vernoux, Eleanor Faucher, Isabelle Mergault, Agnes Jaoui, Valerie Lemercier release. I've deliberately confined myself to Female writer-directors, a particular strength of current French cinema and a figure I could easily double with their male counterparts. Living in London I am constantly frustrated by the trickle of French films that are released here each year. Even Cine Lumiere, on paper the flagship for French cinema is currently mounting a Spanish season and spends something like three to four months each year screening Italian, German, Spanish fodder and would probably cheerfully mount an Innuit season if they could find sufficient titles. Luckily Paris is only two hours away by Eurostar but maybe the question to be addressed is why is London denied so much of the finest Cinema in the world.

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